Dans son travail récent, Jumana Manna utilise la vidéo et la sculpture comme les supports d’une réorganisation de l’archive relative à l’histoire des pays du Proche-Orient et de l’Europe du Nord – qu’elle envisage comme des entités géographiques distinctes mais néanmoins liées. L’exploration porte ainsi sur la façon dont les formes de pouvoir – économiques, politiques, interpersonnelles – conditionnent aussi bien l’architecture que la vie humaine et végétale. Jumana Manna s’intéresse en particulier aux non-dits qui accompagnent les pratiques scientifiques actuelles de préservation ; son travail questionne ainsi les constructions binaires qui renvoient dos à dos un héritage pur et immuable et l’emprise de l’innovation. Dans Wild Relatives [Parentés sauvages], un film réalisé spécialement pour la programmation Satellite, Jumana Manna traque les rapports de hiérarchie et de pouvoir qui accompagnent une transaction de semences entre la ville de Longyearbyen, dans l’archipel arctique du Svalbard (Norvège) et la plaine libanaise de la Bekaa. Le film suit le voyage des semences, retrace le parcours de ces formes de vie à mesure qu’elles sont extraites du sol et transplantées ailleurs, passant du sol aride au permafrost et vice-versa. Accompagnant l’exposition de Jumana Manna à la Maison d’Art Bernard Anthonioz, dans le cadre de la programmation hors les murs du Jeu de Paume, et au CAPC musée d’art contemporain de Bordeaux, le présent livre comprend un essai de l’historienne Shela Sheikh et un texte de l’artiste déroulant les réflexions qui l’ont menée à son projet.
Initiée en 2007, la programmation Satellite du Jeu de Paume est dédiée à la création contemporaine. Depuis 2015, le Jeu de Paume et le CAPC musée d’art contemporain de Bordeaux organisent conjointement ce programme d’expositions, assuré dès sa création par des commissaires d’envergure internationale (Fabienne Fulchéri, María Inés Rodríguez, Elena Filipovic, Raimundas Malašauskas, Filipa Oliveira, Mathieu Copeland, Nataša Petrešin-Bachelez, Erin Gleeson et Heidi Ballet). Intitulé « L’économie du vivant », la dixième édition confiée à Osei Bonsu a pour propos la constante mobilité, par-delà les frontières réelles ou imaginaires, des corps, des plantes, des animaux, des œuvres d’art, ainsi que d’un certain nombre d’autres produits culturels. Ce projet en quatre temps procède de l’idée qu’une des façons de comprendre l’état du progrès humain de nos jours est de consigner visuellement l’expérience vécue. Dans un paysage géopolitique en constante expansion, nous pouvons voir comment les grands axes imposent conflit et agitation à la circulation des peuples, des marchandises et des processus. Se projetant au-delà de la simple idée d’une cartographie de l’histoire, les œuvres d’Ali Cherri, d’Oscar Murillo, de Steffani Jemison et de Jumana Manna – toutes spécialement commanditées pour l’occasion – parcourent les espaces étrangers et familiers afin de rendre visible la secrète migration des choses vivantes. Chaque exposition est accompagnée d’une publication imaginée comme une carte blanche au commissaire et aux artistes. Conçue dans un dialogue étroit avec un studio graphique renouvelé à l’occasion de chaque édition, cette série d’ouvrages s’offre comme un espace de création autonome au sein de la programmation Satellite.Book details
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Original text
Yes -
Language
French -
Original language
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Publication date
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Page count
64 -
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